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Les chiffres des réacteurs nucléaires belges décortiqués

Nos centrales vieillissent.
Les contrôles se renforcent et la disponibilité de l’énergie nucléaire diminue en conséquence.
Une situation qui a renforcé le risque de délestage (coupure partielle) du réseau lors de plusieurs périodes critiques.
Qu'en est-il pour cet hiver ?
Nous avons passé les chiffres au peigne fin pour mieux les comprendre.

Article publié initialement en novembre 2018 et mis à jour en octobre 2019

Quand elles fonctionnent, nos centrales nucléaires fournissent une part importante de l’électricité du pays. C’est d’ailleurs cette dépendance à ce type d’énergie qui a provoqué des risques de déséquilibre voire de délestage en 2015 et 2018, alors que plusieurs réacteurs étaient à l’arrêt lors de périodes critiques.

En 2018, environ la moitié de la production d’électricité en Belgique provenait de nos centrales. Une situation qui a fortement évolué au cours de l’année. En janvier, le nucléaire comptait pour plus de 63 % du mix énergétique belge, tandis qu’en septembre le nucléaire tombe à 38 % de la production totale. Les données de 2019 sont bien plus positives.

Nous avons compilé les chiffres présents sur le site Transparency. Engie-Electrabel y note les disponibilités de chaque unité de production électrique du pays.

On peut y voir le fonctionnement ou l’arrêt de chaque réacteur en détail. Tous les tests, maintenances, révisions, planifiés ou non, y sont répertoriés.

Les données permettent de se faire une idée de la disponibilité réelle de chaque réacteur nucléaire. Mieux, le site permet aussi de suivre le calendrier de révision attendu. Nous avons donc regardé jusqu’au 31 mars 2020 les arrêts prévus pour chaque unité de production.

Réacteurs allumés ou non en fonction des dates

Sélectionnez une date entre le 1er janvier 2012 et le 1er juin 2019

  • En marche
  • Arrêt planifié
  • Arrêt non planifié
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    Doel 1

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    Doel 2

  • En marche

    Doel 3

  • En marche

    Doel 4

  • En marche

    Tihange 1

  • En marche

    Tihange 2

  • En marche

    Tihange 3

Pourcentage de jour où les réacteurs sont allumés en même temps

« La dernière phase des travaux »

Pour remettre ces chiffres dans leur contexte, Engie-Electrabel martèle que la plupart des arrêts s’inscrivent dans un calendrier de révisions bien défini, comme l’explique Anne-Sophie Hugé, porte-parole du groupe.

Peut-on dire que 2019 aura été tout à fait normale pour la production du nucléaire ?

L’année n’est pas encore finie donc il faut rester prudent. Mais on retrouve des niveaux de disponibilité classiques. Si je prends la moyenne des dernières années, depuis 2000, on tourne autour de 81 % et pour cette année on sera probablement juste en dessous de 80 % pour l’ensemble du parc nucléaire.

Quelle est la situation actuelle des réacteurs à l’arrêt ?

Doel 1 et Doel 2 sont dans une phase d’interruption plus longue qu’un entretien habituel, puisqu’on effectue en ce moment des travaux plus lourds dans le cadre de la prolongation des centrales. On est entré dans la dernière phase de ces travaux et effectivement ces deux unités ne seront pas disponibles cet hiver.
Tihange 2 est à l’arrêt pour une maintenance technique classique et le réacteur redémarrera mi-novembre.
L’unité de Tihange 1 sera, elle, mise à l’arrêt le 31 décembre pour plusieurs mois également. Comme à Doel 1 et Doel 2, il s’agit des travaux dans le cadre de la prolongation des centrales.

L’âge des centrales joue donc un certain rôle dans leur indisponibilité.

Pour les plus vieilles centrales (Doel 1 et 2 ainsi que Tihange 1), à la suite de leur prolongation jusqu’en 2025, il a fallu lancer un programme particulier d’investissement pour pouvoir les maintenir en activité en toute sécurité. Ça signifie effectivement des arrêts supplémentaires.
En plus de cela, nous avons un plan décennal, pour remettre les réacteurs à niveau tous les 10 ans, avec les normes les plus élevées, toujours sous le contrôle strict de l’Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN).

On a beaucoup parlé de délestage et de black-out l’an dernier et en 2015. Pas de risque pour cet hiver ?

On est dans une tout autre situation qu’en 2018. Nous aurons plus de réacteurs en fonctionnement pour passer l’hiver et globalement, comme je le disais, on est revenu cette année à des taux de disponibilité habituels.
Cet hiver, la ministre a également décidé de ne pas constituer de réserves stratégiques compte tenu de la situation actuelle.
Chez Engie-Electrabel, nous ferons évidemment tout le nécessaire pour assurer notre propre équilibre pour pouvoir répondre aux besoins de nos clients. Nous avons un parc de production diversifié, nous achetons aussi de l’électricité quand c’est nécessaire pour faire face à la demande.

Comment s’explique la faible disponibilité de Doel 3 et Tihange 2 ces dernières années ?

Ces deux réacteurs ont été mis à l’arrêt de longs mois, de notre initiative, notamment après la détection de microbulles d’hydrogène dans certains matériaux, en 2012. Il y a eu des analyses approfondies en 2015. Nous avons pris le temps de les faire avant de remettre un rapport détaillé à l’AFCN, pour répondre à toutes leurs questions avant le redémarrage. L’année 2018 était aussi particulière, marquée par des travaux de béton, dans des bâtiments annexes de plusieurs centrales.

Certains arrêts sont non planifiés. Qu’est-ce que cela signifie ?

Il y a un calendrier de révisions planifié, lié au fonctionnement normal de la centrale, par exemple lorsqu’il faut recharger du combustible. À côté de ça, certains arrêts sortent du calendrier. Par exemple quand nos équipes coupent la centrale de façon préventive pour contrôler un élément, qui peut concerner aussi la partie non-nucléaire du site. Il y a aussi des arrêts automatiques dans certains cas. Tout cela est extrêmement contrôlé pour garantir la sécurité et ne prendre aucun risque pour nos travailleurs et la population.